lundi 11 juillet 2011

CAPADOCCE

(mon compagnon imposé)

Bien décidée a marcher enfin, je repere sur google maps un itinéraire qui me permet de me rendre directement de chez mes couchsurfeurs a Uçhisar par le plateau (12km), puis a Göreme par une vallée.
Auparavant je dois traverser encore une serie d'immeubles sans ame, comme ils savent en pondre des dizaines de kilometres aux alentours des villes.
Puis je couperai par divers chemin.
Mais quelqu'un qui me voit passer en bas de chez lui "s'inquiete" de me voir partir vers "rien", et me rejoint en courant.
Questions... Je lui explique ou je vais, il déclare évidemment que c'est dangereux, et décide de m'accompagner. Il me semble bien comme toujours, que le seul danger ici se pourrait être lui, mais comme toujours j'accorde le bénéfice du doute, nous verrons bien.
Bien sûr il me fait prendre un chemin différent que celui que j'avais envisagé, se perd, nous oblige a couper a travers buissons et herbes, et rallonge considérablement le parcours.
Bien sûr entre temps il tente des pauses "a l'ombre", que je refuse, arguant que je ne m'arrête jamais, et enfin, de retour sur un vrai chemin, il finit par abandonner la partie.
J'ai mené un train d'enfer, il fait une chaleur a crever, et il était parti sans se douter de ce qui l'attendait, sans chapeau, sans eau. J'ai bien cru qu'il allait me claquer dans les mains.
Enfin libre, j'arrive a Uçhisar
(le "château" d'Uçhisar)



Est-ce que je me cherche une petite chambre la-dedans? Non, il est encore trop tôt, je tente la vallée vers Göreme
Belle vallée hein? Malheureusement c'est un cul de sac. Retour sur mes pas, a la recherche de la bonne vallée.
La voici
Arrivée a la sortie de la vallée, je suis invitée a partager le plantureux pique-nique d'une famille venue d'Istanbul pour visiter la Capadocce.
A l'entrée de Göreme, je fais un pause thé dans un hotel, afin de recharger mon téléphone, mon appareil photo, et faire le plein d'eau. Le propriétaire me demande bien sûr ou je vais dormir, et je lui dis franchement que je cherche une petite grotte pour passer la nuit. J'en ai repéré dans la vallée par laquelle je suis arrivée.
Il me le déconseille, disant que des gens saouls viennent régulierement y faire la fête. Il m'indique en revanche un chemin qui monte en face, menant a une petite église, au dessus de laquelle je devrais trouver mon bonheur. Qui plus est, s'il y a quoi que ce soit, je n'aurais qu'a crier, et il pourra peut-être m'entendre.
Je m'amuse a imaginer quelle serait la reaction d'un hotelier Français, si vous boudez ses chambres. Vous offrirait-il conseils, attention et protection? J'en doute...
Eglise creusée

Acces a l'étage inférieur

Il va me falloir choisir...
Voici ci-dessus la fenêtre de ma chambre. Comme m'a dit Célio:" Je comprends que ta tente ait eu du mal a rentrer dans un colissimo, et qu'elle ait mis si longtemps a arriver!"
C'est sûr! Et je ne vous parle pas du remballage...

Intérieur de mon nid douillet. Je pense qu'il s'agit aussi d'une ancienne église.

Des l'aube, le bruit des bruleurs des ballons survolants la Capadocce se fait entendre.
En début d'apres-midi, j'arrive dans le village d'Ortahisar, ou je fais une pause pique-nique sur un banc a l'ombre.
Il se trouve que je me suis installée juste a côté du magasin de Crazy Ali.
Il m'offre un thé, un jus d'orange, et a l'ombre de sa boutique, me récite quelques uns de ses poêmes. Puis je feuillette son recueuil de poêmes, plus de 500 a ce jour, dont certains traduits en Français, Anglais, espagnol, Allemand par ses nombreux amis.
C'est que Crazy Ali n'est pas n;importe qui! Il est en autres cité dans des guides touristiques, et en cherchant sur internet, vous pourrez sans doute trouver quelques uns de ses poemes. Certains sont magnifiques.
Nous passons quelques heures ensemble, il ferme son magasin pour m'emmener sur sa vespa visiter un monastere a quelques kilometres de la, puis de retour au village, m'indique une vallée ombragée pour continuer ma route. Il connait toutes les promenades de la région, qu'il fait habituellement les nuits de pleine lune. Mais je serais déja repartie.
Le monastere. Personne. Il ne doit pas être sur l'itinéraire des tours opérateurs.

Ci-dessus Crazy Ali, qui connait tous les détails du lieu.
Dont cette étrange silouhette humaine, unique en son genre, perchée dans un coin de l'église...
Apres l'avoir quitté a regret, je m'engage dans la vallée dont il m'a parlé.
Mais il ne m'en n'a pas indiqué le sens, et je le descends alors qu'il fallait sans doute la remonter... Ce qui me vaudra de bonnes et mauvaises surprises. Les bonnes sont que d'une part la descente mene au village dans lequel je désirais me rendre initialement, et que cette petite vallée sauvage est magnifique. Mais d'autre part, qui dit vallée qui descend apres village, dit égouts du village, et qu'il n'y a pas de chemin. Batailles d'orties, de boues douteuses, odeurs, plastiques... Quel dommage! Car c'est vraiment une merveille, avec passage sous-terrain, arches naturelles...
Lorsque je ressors enfin, je retombe sur la petite route qui mene au village de Mustafapaşa. Alors que je marche perdue dans mes pensées, une camionnette s'arrête, et les occupants me helent directement en Français. Ozgür, guide pour une agence de randonnée Française, me dépose au village, et me présente son frere qui y tient un charmant hotel. Négociations, affaire conclue.
(ma chambrette)
Le lendemain, je pars visiter la cité sous-terraine de Kaymaklı.
Ces cités, dont on ignore presque tout (dates, occupation...), peuvent s'enfoncer de plus de 80 m sous terre, sur un nombre d'étages indéterminé. Les chrétiens s'y réfugiaient lors d'invasions. Mais y vivaient-ils réellement le reste du temps? Mystere.
Des systemes de puits d'aération perfectionnés permettaient de résister aux tentative d'enfumage de l'ennemi.
On y trouve des écuries, des églises, réserves de nourriture, et salles destinées a faire du vin. Heureusement, parce que je vous assure que même moi qui ne bois pas, je n'aurais pas pu y passer deux jours sans me bourrer la gu...

D'énormes portes roulantes fermaient les acces lors des attaques. Le trou au milieu permettait qui plus est de transpercer d'un coup de lance qui tentait de s'en approcher.

Puit d'aération

De retour a Nevşehir. Fait chaud.
Le lendemain, je visite le musée a ciel ouvert de Göreme. de nombreuses églises et monasteres creusés dans la roche, et parfois richement décorés.

Cette petite église, qui ne possédait qu'une minuscule ouverture, a permis la conservation parfaite des peintures s'y trouvant.
Je quitte la Capadocce par Kayseri, dont voici ci-dessous le caravansérail.

Le bazard
caravansérail

Ici, les petits lavabos pour se laver les pieds avant la priere sont tres nombreux, car tres nombreux aussi ceux qui se rendent a la mosquée. D'ailleurs contairement a Istanbul ou tout est prévu pour les touristes (foulard, manteau long...), il n'y a rien, il faut apporter son propre matériel. Et des l'entrée, on vous indique l'endroit réservé aux femmes.

(les remparts de Kayseri)
(Au loin, Erciyes, l'ancien volcan, enneige toute l'annee.)
(Sunnet dugunu)

Pour finir, je ne peux résister a l'envie de vous raconter ma nuit Turque tres spéciale. Hébergée chez Mete, a Kayseri, j'espere me reposer de quelques nuits tres insuffisantes. Mais, le premier soir, nous attendons son frere, qui est de passage pour quelques jours, et est en retard. Nous l'attendons au bureau de Mete, puis finalement nous nous rendons chez lui, et attendons encore. Son frere finit par arriver avec sa famille, mais ils ont deja mangé, et pas nous. Nous préparons un petit truc, et je vais enfin me coucher. Ca, c'etait la nuit cool, mais courte.
Le lendemain, apres avoir attendu Mete looongtemps a son bureau, il arrive tres en retard, et me dit que nous allons manger dans un restaurant de poisson, quelque part, loin.
Mais nous attendons son frere, qui ne sait pas ou c'est, et attend lui-meme son cousin.
Nous finissons par y aller, et en effet, c'est loin.
Lorsque nous arrivons, il y a deux restaurants, style guinguette, dont l'un bourré de monde, avec de la musique. Peut-etre un mariage... En fin de compte il s'agit d'une "sünnet düğünü", l'équivalent d'une barmitzva.
Nous étions seulement passés jeter un oeil, mais a peine le pere nous apercoit-il, qu'il nous invite a nous assoir, et nous fait porter des plateaux de nourriture. Nous mangeons en regardant les gens danser, et assistons a la cérémonie. Puis mes compagnons se levent, pour se rendre a l'autre restaurant. Mais pourquoi demandé-je? Ben, pour manger. Mais on a déja mangé! Non, nous on a juste grignoté, maintenant on va manger du poisson.
J'attaque donc mon deuxieme diner, un magnifique poisson qui nageait encore sous nos yeux il y a quelques minutes dans un grand bassin.
(nous voici attablés devant nos poissons)

Apres ce double repas, nous rentrons. Je me précipite dans ma chambre, et me couche rapidos. Enfin une grosse nuit de sommeil...
Mais juste avant d'éteindre la lumiere, j'entends le bruit d'une chute d'objet. Bon. Et deux minutes plus tard, Mete frappe a ma porte, tres calme. Je le rejoins.
Il est en train de pisser le sang, et me demande de lui faire un garrot. Il s'est coupé en cassant un verre. Méchamment coupé.
Une tres profonde coupure dans la pulpe de l'annulaire gauche, plus quelques autres coupures aux autres doigts. Ça coule ça coule.
Il y a un petit hôpital en bas de chez lui. Avant de descendre, même si ce n'est qu'a cent metres, je prends quelques affaires, argent, téléphone (qui ne telephone pas), ...
Mais Mete, confiant et perturbé, il y a de quoi, ne prend rien.
A l'hôpital, seuls trois infirmiers-ambulanciers sont la. Ils nettoient la plaie, mais il faut recoudre, et ils ne peuvent le faire. Ils posent quelques pansements, et nous voila partis en ambulance pour un plus gros hôpital, a une douzaine de kilometres de la.
Apres le temps nécessaire passé aux urgences un samedi soir, nous ressortons, ce pauvre Mete décoré de grosses poupees, et de quatre points de suture a l'annulaire.
Mais les ambulances ne fonctionnent que dans un sens. Pour rentrer, il va falloir nous débrouiller. Il est tard, il n'y a plus de transport.
Qu'a cela ne tienne, sa cousine, qui accueille son frere et sa famille, n'habite pas loin. Nous ne pouvons les appeler, car Mete n'a pas son téléphone, et ne connait aucun numero par coeur.
Nous marchons donc. Tiens, il croyait que c'etait plus pres... Nous marchons encore. Et encore.
Voila. C'est la. Enfin peut-etre. Il n'y a pas le nom de la cousine sur l'interphone, ni la voiture du frere devant.
Apres avoir essayé quelques sonnettes au hasard sans succes, nous attendons, tournons, virons, nous rendons dans un mini market ouvert. Le gars cherche le numéro par les renseignements, ne trouve pas, puis le numero du cousin, ca ne répond pas. Il a gentiment flingué son forfait, mais toujours rien.
Nous faisons une nouvelle tentative chez la cousine. Rien.
Je propose de prendre un taxi, mais n'ai pas assez sur moi, et Mete rien. Qui plus est a cette heure de la nuit les taxis sont parait-il tres chers.
Nous nous rendons donc dans un commissariat, pour leur demander s'ils peuvent trouver le numero du frere, qui doit etre en liste rouge.
Holala, asseyez-vous, prenez un thé, on s'occupe de tout.
Ils nous offrent donc un the, et expliquent qu"ils sont la pour aider, donc ils vont nous raccompagner. Nous attendons alors une voiture de patrouille, qui nous pose devant notre porte.
Finalement, il n'est que trois heures du matin. Il nous reste encore deux petites heures avant le lever du soleil. Nous avons fait deux hôpitaux, une ambulance, la police, je propose donc a Mete les pompiers pour finir la nuit en beaute. Mais petit joueur, il prefere rentrer se coucher.
Heureusement nous avons beaucoup ri, et cette soirée restera dans nos mémoires...

10 commentaires:

  1. Le récit devient épique ...
    Bonne route,
    Mykeul

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  2. Bonjour

    Je vous ai entendu l'autre jour sur france inter pendant que je faisais des travaux de peinture dans mon futur appart.

    Le thème de l'émission me plaisait et votre témoignage m'a estomaqué !! je visite votre blog ce soir, lis vos péripéties... c'est beau votre confiance.

    Je vais vous suivre où plutôt vous accompagner...

    A bientôt

    Fabienne
    fabie.m@free.fr

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  3. Je vous ai entendues sur Inter ! sympa votre périple. Courage, je viendrai de temps en temps vous lire.

    Judith

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  4. Je vous ai entendu sur France Inter et depuis chaque jour pour vous accompagner je visite votre Blog. Je suis Admiratif et Impressionné.
    "Sur les Chemins du Soleil Levant Françoise est passée et sa bonne Etoile l'a accompagné ..."

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  5. un grand bravo pour votre ouverture d'esprit,j'ai beaucoup marché mais seulement en France.je vous souhaite toutes les joies possibles .à bientôt sur votre blog .Monique
    Merci à France inter qui nous a permis de vous connaître et de voyager avec vous .

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  6. Je vous suis tous les jours depuis l'émission sur france inter. Bravo !!!

    J'espère pouvoir vous imiter d'ici qq années, j'en rêve depuis si longtemps !!!

    Encore bravo pour votre courage et je vous souhaite plein de belles rencontres ...

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  7. Encore des adeptes de France Inter qui vous rejoignent! Nous vous félicitons pour votre courage et souhaitons vivement que vous alliez le plus loin possible sans toutefois pour autant marcher durant ''33ans''! Nous nous sentons tout petits avec nos 39jours/nuits de bivouac lors de la traversée des Pyrénées !
    On revis la Longue Marche de Bernard Ollivier...mais en direct!
    Bravo pour votre détermination,bonne continuation,bonnes rencontres et à bientôt de vous lire.

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  8. Super photos qui encore donnent envie !!!! Beau récit de rencontre. Ca fait rêver ... Nous qui venons de passer quelques jours à Tauriers !!!Dominique (77/07)

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  9. France Inter a fait une émule de plus !! Je me languis de vos nouvelles...

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  10. Un petit test pour savoir si cela marche. Jacques DASQUE

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